Thursday, July 24, 2014

Bank of America paie moins que la BNP: 16 million de dollars au lieu de 8,9 milliards de dollars

Qui peut le plus paie le moins.
Serait-ce la conclusion de la série des amendes et sanctions financières U.S. contre les banques ?

Bank of America vient d’être condamnée par l’OFAC  Office of Foreign Assets Control  à payer 16 million de dollars au Trésor Américain pour s’être engagé dans le blanchiment de narcodollars,

C’est nettement moins que les 8,9 milliards d’amende infligées à la BNP pour avoir conduit des transactions avec des pays interdits par les Etats-Unis.

On peut arguer fort justement de ce que les faits sont différents, ce qui est exact, ainsi que les montants incriminés. Cependant cette infraction de la Bank of America est une parmi d’autres commises par certaines banques américaines.

Bien sûr d’aucuns ne manqueront pas de faire remarquer que Citibank s’est aussi vue infliger une amende négociée de 7 milliards de dollars il y a quelques semaines par les autorités financières américaines également. Mais la comparaison ne tient pas, car l’amende de la Citibank portait sur la gigantesque mortgage fraud des MBA, les Mortgage Backed Securities, dont les montants cumulés entre les différentes banques américaines impliquées est plus proche du trillion de dollars, soit mille milliards de dollars.

La fraude en question menée par la Citibank et quelques autres banques américaines, amplifiée par la négligence aventureuse   des mêmes banques avait tout simplement donné lieu à la crise financière de 2007- 2008 qui avait vu la chute de Lehman Brohers et la quasi faillite d’AIG.
La chute de Dexia et les immenses pertes européennes et asiatiques occasionnées par  les emprunts toxiques en sont la conséquence directe. On se rappelle que ces emprunts toxiques contractés par les municipalités et collectivités territoriales dans le monde entier et tout particulièrement en France sont de fait payés par les contribuables asiatiques, européens et Français aujourd’hui.

On se souvient aussi du fameux Too Big to Fail de Greenspan patron de la FED et de Paulson, Secrétaire américain au Trésor. Le résultat fut l’injection d’extrême urgence par le Congrès des Etats-Unis des fameux TARP pour un montant de 700 milliards de dollars en 2008.
Ces mesure furent prolongées, amplifiées et accompagnées de nombreuses prises de participation de l'Etats Americain dans le secteur financier et banques américain et accompagnées plus tard d’autres investissements publics massifs dans l’économie  pour sauver notamment General Motors et les géants de l’automobile américains menacés de faillite.

Doit-on en tirer la conclusion qu’il y a à ici deux poids deux mesures ?

Peut-être.
Peut-être pas.

Pourtant en paraphrasant Geoge Orwell on peut avancer qu’en matière de pénalités bancaires Tous sont égaux, mais certains sont plus égaux que d'autres.

Prof. Olivier Chazoule


Wednesday, July 9, 2014

Les sanctions U.S. contre la BNP et l’émergence d’un monde juridique tripolaire. Troisième partie: la réponse chinoise et la dissuasion financière

La stratégie de résistance, ou plus exactement de conquêtes de la Chine par rapport à la dominance passée et encore actuelle mais probablement pas future des Etats-Unis dans le domaine du droit et de la  finance, s’est déroulée en quatre étapes majeures.

La première étape a été celle de la gentillesse et de la douceur, ce qu’on pourrait appeler la collaboration avec les portes toutes grandes ouvertes, couplée bien sûr avec l’appât du gain réciproque. C’est la libre entrée des Américains et des Européens en Chine depuis 20 ans. Les multinationales américaines et européennes ont été invitées à venir produire en Chine à des prix défiant toute concurrence. Comme les multinationales se sont habituées aux bas couts de productions, elles ont décidé de s’installer durablement, pour produire… et pour vendre.

La seconde étape a été celle qu’on pourrait appeler l’étape de la loi. Dans les années 2005 à 2009 toute une série de cas judiciaires en Chine a mis en difficulté des multinationales européennes et notamment allemandes produisant et vendant des produits chimiques en Chine. Le cas le plus connu est celui d’un travailleur chinois qui est venu travailler en pyjama. Il a été refoulé à l’entrée, mais deux heures plus tard la police est venue chercher les deux directeurs allemandes et les a incarcérés. La légalité de leur arrestation résidait dans leur contravention à une ancienne, mais toujours en vigueur, loi chinoise locale qui autorisait les travailleurs à venir travailler en pyjama. Il fallut plusieurs jours aux patrons allemands en Europe pour réaliser le sérieux de la situation et la détermination des Chinois. Leurs deux cadres supérieurs ne purent sortir de prison que deux semaines plus tard après avoir payé une amende de plusieurs millions de dollars. Les autorités chinoises se sont faites les dents sur les Européennes avant de s’en prendre aux Américains.

La troisième  étape a été celle des sanctions, et on peut situer son apogée en 2010-2011 avec une série de cas mettant en cause le numéro un de la distribution mondiale le géant Wal Mart accusé à la fois de ne pas respecter la législation sur le travail en Chine et de vendre dans ses magasins des produits non conformes à la réglementation sanitaire. Du haut de sa grandeur Wal Mart méprisa d’abord ces attaques. Mais la fermeture immédiate et brutale de plusieurs de ses hyper-marchés et l’arrestation puis l’incération de plusieurs cadres supérieurs et directeurs de magasin du groupe en Chine mit Wal Mart Chine sur les genoux et à la fin de fin 2011 dans la position de considérer la fermeture totale et définitive de toutes ses opérations en Chine. Ayant pesé le pour et le contre et en vertu de ses intérêts bien compris, Wall Mart décida de présenter ses excuses les plus plates, de licencier les cadres  responsables, ou en tout cas officiellement tenus pour responsables, de payer des amendes vertigineuses et surtout de s’engager à respecter pour toujours les lois chinoises…

La quatrième étape enfin est l’étape que l’on pourrait qualifier d’étape de l’ordre et de la puissance juridique et financière chinoise.
La puissance financière américaine a de nombreux visages, mais elle est surtout connue par l’intermédiaire de certains visages particulièrement. Parmi ces visages il y a celui de la SEC et ceux des Big Five.

La  SEC, ou Securities and Exchange Commission est l’autorité suprême des marchés financiers américains et par contrecoup de toutes les sociétés qui sont listées sur le New York Stock Exchanges, ou qui y investissent, c’est-à-dire toutes les banques et les compagnies d’assurance de la planète et toutes les multinationales du monde entier. En d’autres termes la SEC contrôle tout, partout, tout le temps.

Les BIG Five sont les géants de l’expertise comptable, de l’audit et la certification des comptes des sociétés dans le monde. Elles valident et certifient les comptes des entreprises cotées à la bourse de New York, le NYSE, et sont garantes de la régularité des bulletins de santé des sociétés cotées, ce bulletin de santé qui détermine le cours de actions de ces sociétés.

Pour clore la boucle, comme la SCE contrôle les BIG Five, cela signifie que le grand chef des contrôleurs contrôle les contrôleurs.

Une des trouvailles des marchés financiers américains a été de double -lister des sociétés à Wall Street et sur dans les bourses de Hong Kong et de Shanghai. Cela signifiait plus de fonds, plus d'actionnaires, plus d’argent. Mais cela s’avéra aussi être le talon d'Achille de la suprématie financière américaine.

Entre 2011 et 2013, une des Big Five, la filiale d’Accenture en Chine, et ensuite d’autres parmi les Big Five, ont été la cible de la SEC concernant la vérification des comptes de sociétés chinoises listées à la fois sur les marchés financiers en Chine et à Wall Street. La SEC exigeait qu’Accenture livre des informations secrètes sur ses sociétés clientes chinoises. Si Accenture ne le faisait pas les dirigeants d’Accenture pouvaient être emprisonnés aux Etats-Unis et Accenture frappée d’amendes énormes.

Cependant pour la première fois il y eut une complication, une complication de taille.

Cette fois-ci, la China Securities Regulatory Commission (CSRC) et surtout le Gouvernent chinois ont montré les dents.
La SCRC est l’équivalente de la SEC chinoise.

L’argumentation de la SCRC et du Gouvernent chinois est que les informations exigées par la SEC de la part d’Accenture à propos de ses sociétés clientes étaient des secrets d'affaires chinois protégées par la loi chinoise sur le secret des transactions d’affaires. Leur violation se serait soldée par la mise en prison, en Chine cette fois, des dirigeants d’Accenture en Chine.

En d'autres termes les dirigeants Accenture avaient le choix entre obéir à la SEC et aller en prison en Chine ou désobéir à la SEC et aller en prison aux Etats-Unis.

Apres deux ans de lutte acharnée, l’affaire dAccenture, et les autres, se sont soldées par un accord. Les autorités financières chinoises ont autorisé que certaines informations soient révélées à la SEC et la SEC s’est contentée d’une portion réduite de renseignements.

Bilan de l’opération ? Victoire totale de la Chine  qui a obtenu ce qu’elle voulait depuis le début : que le monde entier reconnaisse la suprématie désormais partagée par les Etats-Unis et la Chine de la domination de la finance internationale.

Depuis 2013 il y a deux super-gendarmes de la finance dans le monde : la Securities and Exchange Commission et la China Securities Regulatory Commission.

Ce que l’on pourrait qualifier de nouvelle Dissuasion Financière.


Prof. Olivier Chazoule
Professeur de Droit
Directeur des Etudes
New York Institute of Business and Finance
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Thursday, July 3, 2014

Les sanctions U.S. contre la BNP et l’émergence d’un monde juridique tripolaire. Deuxième partie: la réponse européenne

La réponse juridique et financière européenne aux sanctions infligées à la BNP va venir. On peut même dire qu’elle est déjà arrivée… et cela depuis 1957.

A la fin de la Seconde Guerre Mondiale les Alliés réalisèrent que la rivalité Franco-Allemande qui avait déjà résulté en trois guerre en moins d’un siècle devait être définitivement stoppée.

Une étude approfondie des différents moyens possibles pour y  arriver conduisit les différentes parties à décider de réaliser une Union Economique Européenne (en plus de la CECA du charbon et de l’acier et d’Euratom) liant les protagonistes de manière économique étroite et les conduisant à éviter tout futur conflit pour ménager leurs intérêts économiques immédiats.

En clair : le commerce pour éviter une nouvelle guerre.

C’est l’origine du Traité de Rome de 1957.

Un des fondements principaux du Traité de Rome et de la pratique économique et juridique de l’Union de Etats Européens est la politique de la Concurrence. En fait, c’est une politique juridique, financière et économique issue des antitrust laws des Etats-Unis, un corps de doctrines juridiques et de lois très puissantes visant à limiter les effets pervers des grands groupes et financiers dominants dans l’économie américaine à commencer à l’époque par le groupe pétrolier Rockefeller :  Sherman Act 1890, Clayton Act 1914 et Federal Trade Commission Act 1914. Il s’agit par tout moyen d’éviter les monopoles et les situations de domination des marchés, ou oligopoles.


Au fil des ans, la politique de la concurrence de l’Union Européenne, est devenue autonome de ses origines américaines. Et de copie elle est devenue innovatrice et très forte. Si bien qu’aujourd’hui on peut dire que la politique de la concurrence européenne est beaucoup plus développée et efficace que la politique antitrust américaine.

L’arme favorite de la Commission Européenne de Bruxelles et de la Cour de Justice de l’Union Européenne de Luxembourg pour faire respecter la concurrence est l’administration d’amendes énormes aux entreprises et singulièrement aux entreprises multinationales américaines, comme par exemple : Intel, 1,4 milliards de dollars en 2009 ; Microsoft, 1,2 milliards de dollars en 2008 ou Microsoft encore avec 757 millions de dollars en 2013 ; en fait si Bruxelles avait appliqué la règle jusqu’au bout la sanction aurait pu s'élever à 10% du chiffre d'affaires mondial de Microsoft, soit 7,9 milliards de dollars.

Le nouvelle arme de Bruxelles est constituée par la toute récente directive Barnier qui met sous contrôle de fait les grandes agences de notations financières qui ont  fortement contribué à l’ampleur énorme de la crise des subprimes de 2007-2008 en favorisant la création incontrôlée des MBS, les Mortgage Backed Securities et de leur explosion subséquente.
Désormais les agences de notation, principalement américaines sont responsables de leurs actes devant la Commission Européenne.

Les Américains, comme les Anglais dans la célèbre phrase du comte d'Anterroche, à la bataille de Fontenoy, tirèrent les premiers. Mais l’issue de la bataille ne fut pas favorable à ceux-là mêmes qui avaient tiré les premiers.

Ici il ne s’agit heureusement que de conflits financiers.

Mais fallait-il bien que les autorités financière de contrôle américaines  dégainent les sanctions les premières face à une Europe à l’arsenal de contrôle financier et juridique lui-même très fourni?

Comme on dit, l’avenir nous le dira et les paris sont ouverts.

Prof. Olivier Chazoule
Professeur de Droit
Directeur des Etudes
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